23 août 2018
Aretha Franklin, la grande voix US de la soul music, s'est éteinte le 16 août 2018. Beaucoup se souviendront de ses succès tels que “Respect”, “Think” ou encore “A Natural Woman”, mais connaissez-vous ses racines gospel ?
Surnommée The Queen of Soul ou Lady Soul, Aretha Franklin a succombé à un cancer du pancréas, le 16 août dernier.
Au total, la chanteuse a traversé 4 décennies au sommet de la soul music et du rythm & blues, interprétant ses titres devant les grands de ce monde - on se souvient notamment de sa prestation lors de l’investiture du président Obama en 2009 - et sur les + grandes scènes.
Bien connue également pour son engagement dans la lutte pour l’égalité dans l’Amérique ségrégationniste des années 1960, Aretha Franklin est une figure incontournable de la communauté noire américaine, à l'instar de Martin Luther King qu’elle accompagnera lors de plusieurs manifestations. Elle chantera d'ailleurs pour ses obsèques en 1968 un mémorable “Precious Lord, Take My Hand”.
Regardez Aretha Franklin chanter pour les funérailles de Martin Luther King
À elle seule, cette chanson ne laisse aucun doute sur le background profondément gospel de la carrière d’Aretha Franklin. C'est en effet à l’église que tout a commencé…
Fille de pasteur, c'est sur les bancs de la New Bethel Baptist Church de Détroit que la jeune Aretha se fait remarquer par l’impressionnante étendue de sa voix - 4 octaves -, sa technique saisissante et son sens exceptionnel de l’interprétation.
Pendant les premières années de son adolescence, Aretha Franklin suit son père lors de ses missions, chante dans plusieurs églises des Etats-Unis et enregistre même à cet époque le tout premier album de sa discographie, Songs of Faith. Nous sommes en 1956, Aretha n’a alors que 14 ans et confirme déjà le dicton : “Aux âmes bien nées, la valeur n'attend pas le nombre des années”.
Être née à l'église ne fait pourtant pas tout et si le talent d’Aretha éclôt de manière précoce, les épreuves de la vie et les mauvais choix n'attendront pas eux aussi. Comme malheureusement bon nombre de ses consoeurs chanteuses américaines issues des églises, Aretha va sacrifier énormément sur l’autel de la réussite artistique. Sa vie privée et familiale, mais aussi l’héritage et les valeurs de la foi chrétienne.
Aretha Franklin signe chez Columbia Records en 1960 avant de rejoindre le label Atlantic en 67. Sa carrière cantonnée jusqu’alors au gospel décolle de manière fulgurante, avec les tubes que l’on connaît : “A Natural Woman”, “Respect”, “Chain of fools”, “Think” ou encore le joyeux “I Say a Little Prayer For You”. Une chanson d’amour dont les paroles empruntent au lexique de la prière. Ce qui a fait dire faussement à certains commentateurs qu’Aretha est “la première star à avoir fait rentrer le gospel dans la musique profane”. Ce qui nous laisse plutôt penser qu’il y avait chez cette artiste une perpétuelle hésitation entre le sacré et le profane. Non pas que les deux ne puissent cohabiter raisonnablement mais il y a dans le parcours d’Aretha Franklin le sentiment d’un “entre-deux”.
Pourtant, c’est bien le gospel qui apportera à Aretha Franklin le + gros succès de sa carrière. Les 13 et 14 janvier 1972, elle enregistre en live Amazing Grace, une collection de cantiques gospel traditionnels. Les prises de son ont lieu à Los Angeles dans l’église du célèbre pasteur James Cleveland, The New Temple Missionary Baptist Church. Le double-album est un succès sans précédent : il grimpe à la 7ème place du Billboard 200, le classement des meilleures ventes d’albums et 2 millions d’exemplaires s’arrachent aux Etats-Unis. Aretha ne vendra jamais autant de disques et à ce jour, Amazing Grace est l’album live gospel le + vendu de tous les temps. La diva de la Soul est à son apogée.
Regardez Aretha Franklin chanter en live le cantique "Amazing Grace"
La même année, Aretha Franklin livre à nouveau une interprétation mémorable de “Precious Lord, Take My Hand”, lors des obsèques de son amie Mahalia Jackson, la “Reine du gospel”.
Puis en 1987 paraît le double-album live One Lord, One Faith, One Baptism. Le succès est bien plus modeste - 300.000 disques écoulés tout de même - mais cet enregistrement témoigne à nouveau qu’Aretha Franklin n’a jamais renié ses racines gospel.
Regardez Aretha Franklin chanter en duo avec Mavis Staple “Oh Happy Day”
C’est indéniable : très peu d’artistes sont capables de transmettre les émotions du gospel aussi bien que “Sister Aretha” comme on la surnommait parfois aussi. Pourtant, on ne peut s’empêcher de se demander si au delà des apparences de la piété, au delà du style musical gospel, Aretha avait renoué avec ce qui en fait la force : la foi véritable en Jésus, le message de vérité de l’évangile et l’espérance qui lui est attachée.
La réponse, nous ne l’avons pas. Mais c’est de tout coeur que nous espérons qu’Aretha Franklin a rejoint la maison. À l’image du fils prodigue qui, malgré ses mauvais choix et ses erreurs de parcours, a su revenir vers son père et goûter à une Amazing Grace.
“Precious Lord, take my hand. Lead me on, let me stand. I'm tired, I'm weak, I'm lone. Through the storm, through the night. Lead me on to the Light. Take my hand precious Lord, lead me home.”